Les Borgia, Marcel Brion

Les Borgia : Le Pape et le Prince par BrionRésumé : Le seul nom des Borgia évoque encore l'inceste, l'orgie, le trafic d'indulgences, le poignard et le poison et tout ce qu'ils ont pu posséder de qualités (la hauteur de vues et l'habileté politique d'Alexandre, l'énergie et le courage de César, le charme et le raffinement de Lucrèce) a été comme occulté. Marcel Brion s'est attaché à rétablir leur réputation dans le contexte socio-culturel de la Renaissance.

Quatrième de couverture : Orgies, népotisme, concussions, meurtres politiques ou privés, licence sexuelle et incestes, il n'est pas un scandale qui n'ait pas été associé au nom des Borgia. Entretenue et grossie par les calomnies de leurs ennemis politiques, une légende noire s'est créée autour du pape Alexandre VI et de ses enfants, César et Lucrèce Borgia. C'est oublier que toute l'Italie fut elle-même gangrenée par la décadence des mœurs. Historien et romancier hors pair, Marcel Brion s'est attaché à replacer l'histoire de cette famille dans son siècle, et faire ainsi la part du mélodrame et de la vérité historique.

Mon avis : Biographe sérieux et reconnu, Marcel Brion rétablit ici à sa juste valeur l'histoire des Borgia, tout en nuance, c'est-à-dire en retraçant les faits sans en faire les monstres qu'on pense, ni en adoucissant leurs traits. Partant de leur réputation parfois injuste et souvent établie par leurs adversaires, basée le plus souvent sur les écrits de Burchard, valet au Vatican dont la rancœur noircit un peu les faits, l'auteur replace tout dans leur contexte historique ; c'est-à-dire qu'il place l'illustre famille non pas face à une moralité absolue (comme de nos jours où tout est bien policé face à la violence et au sexe) mais dans une moralité contextuelle soit à cet endroit, à cette époque, dont les mœurs et les vertus n'étaient somme toute pas aussi puritaines qu'aujourd'hui. Aussi ces hommes violents et sensuels n'étaient-ils ni mieux, ni pires que leurs contemporains mais ce sont trouvés à faire des choix pour leur survie face à leurs adversaires qui auraient bien fait la même chose à leur place. Ce qui distingue les Borgia des autres familles, c'est cette aura qui les entoure, cette lutte permanente pour le pouvoir que d'autres ont déjà eu avant et poursuivront après. Visionnaires, fins politiques et diplomates, ils sont su prévoir l'avenir de l'Italie unifiée, un peu trop tôt pour leurs contemporains. Je regrette encore que l'auteur ne s'axe pas davantage sur les principaux intéressés.
Ajoutons à cela que Marcel Brion n'argumente pas ses propos. Il a sa propre opinion, celle que les Borgia n'étaient pas pire que les autres. Il assène cette « vérité » tout au long du bouquin, et lorsqu'il rapporte des avis divergents du sien, il les écarte sans se donner la peine d'expliquer pourquoi dans le détail, se contentant de se rattacher à sa vision des personnages étudiés et des mœurs de l'époque. Et lorsqu'il ne veut pas se mouiller sur un sujet particulièrement épineux, ce qui est très fréquent vu la multitude de choses écrites et rapportées sur les Borgia, il expose les différents avis et surtout ne tranche pas. Le livre est construit en partie chronologiquement et en partie thématiquement. À vouloir parler de la famille Borgia de façon générale et à les intégrer dans l'ensemble plus largue qu'est l'Italie des micro-États dans un livre peu volumineux (moins de 400 pages), Marcel Brion a survolé beaucoup de points qui, pourtant, m'auraient beaucoup intéressée. Je trouve par exemple qu'il ne parle pas du tout assez de Lucrèce. Quant à Michelotto, Vanozza ou Giulia Farnese, il n'en dit quasiment rien. Enfin le mystère "de l'enfant romain" n'est évoqué qu'en Appendice et aurait mérité lui aussi d'être développé pour les néophytes.

Afficher l'image d'originePour aller plus loin : Marcel Brion est un historien et biographe dont la réputation n'est plus à faire. Je vous conseille donc d'aller lire l'histoire des plus illustres personnages décrits sous sa plume, de Machiavel en passant par les Médicis. Pour aller plus loin concernant les Borgia, je vais plutôt me tourner vers le Prince écrit par Machiavel, librement inspiré de Cesare Borgia et dont je vous parlerai prochainement.

Commentaires

Articles les plus consultés